Pour enrichir votre vocabulaire.
Voici pêle-mêle quelques mots que j’ai picorés dernièrement.
Vous voulez reproduire une annonce quelconque, un faire-part ou une pub dont le texte vous semble désuet, ridicule ou choquant ? N’oubliez pas de caviarder les passages se rapportant au produit concerné, à la personne en question. Caviarder signifie censurer en biffant les passages d’un texte, en supprimant une partie d’une publication, par exemple une partie des éléments d’une annonce, le nom du produit, de la marque, etc.
Exemple : « L’ensemble des ‚unes‚ de la presse australienne étaient caviardées lundi 21 octobre matin, en signe de protestation contre le recul de la liberté presse et la culture du secret au sein du gouvernement. » (Le Monde, Les journaux australiens se recouvrent d’encre noire pour protester contre la censure)
Lorsque les travailleurs qualifiés s’expatrient pour trouver un emploi dans un autre pays, on parle en France de fuite des cerveaux, au Québec d’exode des cerveaux. Les anglo-saxons appellent cela brain drain.
Exemple : « Au Maroc, la fuite des cerveaux inquiète. Alors que 600 ingénieurs quittent le royaume chaque année, les gouvernements français et marocain ont entamé un dialogue pour trouver des solutions. » (Le Monde, Au Maroc, la fuite des cerveaux inquiète)
Stephen Hawking, Jacques Chirac, Charles de Gaulle – ces trois hommes ont été qualifiés par les journalistes du quotidien Le Monde de figures tutélaires. Se rapportant à « tutelle », l’expression « figure tutélaire » désigne un grand nom de l’histoire et/ou des sciences, une personnalité présidant à la destinée d’une collectivité, d’une époque, d’un lieu ou d’une ville, et cela de façon bénéfique. En allemand, selon le cas, on peut éventuellement parler de « Leitfigur ».
Exemple (dans l’article il est question de Simone de Beauvoir) : « Bien sûr, c’est une figure tutélaire, encore pour ma génération. Elle encourage à s’émanciper de son milieu social – la bourgeoisie pour elle, le monde ouvrier pour moi. » (L’Express, Une figure tutélaire)
Un mot qui fait polémique actuellement en France est le mot ensauvagement, surtout utilisé par l’extrême-droite, mais prononcé et confirmé par Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur depuis début juillet 2020. Le Président de la République, lui, préfère « banalisation de la violence ». Déjà, en 1999, Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’intérieur, avait qualifié les mineurs récidivistes de « sauvageons », ce qui avait provoqué une forte polémique. Le mot ensauvagement n’est rien d’autre qu’une insulte à connotation xénophobe, désormais associé au champ lexical de la délinquance, et un élément de la rhétorique d’extrême droite et des identitaires. Un mot à bannir par conséquent.
Pour en savoir plus sur ce mot et l’évolution de son étymologie, voir l’article L’ensauvagement – un mot à l’histoire sinueuse paru dans Le Monde.
Le Panthéon est un monument situé dans le 5ème arrondissement de Paris, au cœur du Quartier latin. À l’origine, le Panthéon devait être une église, mais depuis la Révolution française, il recueille les dépouilles mortelles de grands personnages ayant marqué l’Histoire de France, entre autres Voltaire, Jean-Jacques Rousseau, Victor Hugo, Louis Braille, Émile Zola, Jean Jaurès, Jean Monnet, Pierre et Marie Curie, André Malraux ou encore Alexandre Dumas. Actuellement, la panthéonisation conjointe éventuelle de Rimbaud et Verlaine suscite un vif débat. La famille de Rimbaud s’y oppose car ce serait, dit-elle, réduire l’œuvre du célèbre poète à l’aventure homosexuelle qu’il a eue avec Verlaine dans sa jeunesse. Or, les deux poètes étaient séparés. De plus, Rimbaud a toujours fortement critiqué les institutions françaises et Verlaine était contre l’institution républicaine. Anti-démocrate, anti-parlementaire, favorable à la monarchie de droit divin. Est-ce un bon fondement pour cet hommage national qu’est la panthéonisation, demandent ceux qui s’opposent à cette mesure.
Pour en savoir plus, lisez l’article Rimbaud et Verlaine au Panthéon, action poétique ou contresens historique ?
Connaissez-vous l’adjectif abscons ? Non, ce n’est pas une forme ancienne de cet adjectif du langage très familier, voire vulgaire, constitué de trois lettres au masculin singulier utilisé pour qualifier un imbécile, un idiot. Abscons signifie : difficilement compréhensible, obscur, inintelligible. Par exemple, Patrick Bezombes écrivait en début d’année dans son article Intelligence artificielle et robots militaires : « On notera également que la plupart de ces définitions restent particulièrement absconses pour les non-initiés … ». Dans le monde littéraire, on associe souvent l’adjectif abscon à l’écrivain Louis-Ferdinand Céline et son style.
Pour terminer, je recommande à tous les amoureux et amoureuses de la langue française, qu’ils ou elles soient de langue maternelle française ou non, le charmant livre suivant :
Ces mots perdus au fond de nos dictionnaires, Jean-Loup Chiflet, Édition Le Figaro Littéraire, avril 2018, ISBN 978-2810508273, prix 12,90 €